L’enjeu de la ville servicielle consiste à agréger des bouquets de service, au plus près des usagers. Mais qui sera le fleuriste de ces services urbains all included ? Si les GAFA essaient de se positionner comme les principaux agrégateurs de la ville intelligente, les collectivités ne sont pas dénuées de ressources.
C’est l’hypothèse que nous développons avec Isabelle Baraud-Serfaty et Clément Fourchy dans le deuxième numéro de la revue THIRD. En voici quelques extraits. Pour retrouver l’ensemble du dossier « A la recherche de la Smart City » avec les contributions de Jean-Bernard Auby, Jean Haëntjens, Bernard Landau ou Christophe Defeuilley, c’est ici.
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« Dans l’économie numérique, le lien direct avec le client devient clef, et la manière de le conquérir est de lui proposer des offres sur-mesure, en temps réel et « packagées », agrégées sous forme de « bouquet de services ». Ces nouvelles offres visent à offrir plus de simplicité d’usage à l’habitant-usager-consommateur : plus besoin par exemple d’acheter les différents tickets de manière fragmentée, ni de se préoccuper de la coordination des horaires ou de la compatibilité des dates. La fréquence des interactions avec l’habitant-usager-consommateur doit permettre également de mieux le connaître et de lui proposer les offres les plus adaptées à ses attentes. La nouvelle stratégie d’Accor est conçue en ce sens : « Amazon a un contact avec ses clients environ deux fois par semaine, Facebook, trois à quatre fois par jour […] Dans l’hôtellerie, nous n’avons que quelques interactions par an avec un même client ». (…)
Avec la constitution de ces bouquets, on voit ainsi fleurir de nouveaux écosystèmes de partenaires. Pour le moment, ceux-ci ne sont pas encore figés, chacun teste ses alliances, et il y a pour le moment autant d’écosystèmes partenariaux qu’il y a d’offres. Mais sans doute une phase de stabilisation, voire de consolidation, va-t-elle s’amorcer. En attendant, la question-clé est celle de savoir qui agrège l’écosystème de partenaires. Pour dessiner ces profils d’agrégateurs, il nous semble qu’il faut raisonner sur la base de ce que nous avons appelé les « facteurs d’agrégation », c’est-à-dire les ressources-clés nécessaires à la production de la proposition de valeur. (…)
Les données usagers sont le facteur d’agrégation classique des principales plateformes du numérique (notamment Google et Amazon), mais aussi des entreprises qui basculent d’un modèle « pipeline » à un un modèle « plateforme », à l’image de la SNCF avec OuiSncf, ou de Nexity qui affiche son ambition de devenir une plateforme de services. La brique « système de paiement », encore peu structurante en France des modèles d’agrégation par les données usagers, est devenue déterminante en Asie : les briques « Alipay » (Alibaba) ou « WeChat pay » (Tencent) sont un facteur d’agrégation essentiel .
Les infrastructures sont le point d’entrée à partir duquel les opérateurs de réseaux traditionnels agrègent une multitude de services complémentaires tournés autour de l’usager, comme on le voit avec Transdev et le « compte mobilité » à Mulhouse.
Enfin, le foncier est le troisième facteur d’agrégation, qui permet notamment l’émergence des opérateurs immobiliers comme agrégateurs de nouvelles offres de services. À partir de l’aménagement d’un nouvel îlot, et de plus en plus, d’un macro-lot, ils intègrent les nouveaux services urbains autour notamment de l’énergie, de la mobilité et des services de conciergerie, et préfigurent l’émergence d’opérateurs de services urbains à l’échelle de quartier, qui sont d’autant plus essentiels que l’aménagement et l’immobilier ne peuvent plus se contenter de produire des mètres carrés mais doivent permettent de vivre dans ses quartiers, et donc d’activer des usages. »
Le sujet vous intéresse ? Tous les rapports de l’étude sur les Nouveaux Modèles Economiques urbains réalisée avec Ibicity et Espelia sont en ligne : www.modeleseconomiquesurbains.com